INTERVENTION
- Intervenante du groupe Tavini Huiraatira : Mme Éliane TEVAHITUA
- Rapport n° 98-2020 du 22/09/2020
- Lettre n° 4333/PR du 20/07/2020
- Temps de parole : 10 mn
- Consigne de vote : FAVORABLE
DOCUMENTS
PREMIERE SÉANCE DE LA COMMISSION PERMANENTE du lundi 11 janvier 2021
Rapport relatif à un projet de délibération portant approbation du compte financier de l’exercice 2019 de l’Institut Louis Malardé et affectation de son résultat
Seul le prononcé fait foi
Chers collègues,
Nous examinons à présent un projet de délibération portant approbation du compte financier de l’exercice 2019 de l’Institut de recherches médicales Louis Malardé.
Pour rappel, en 1949 le mécène William Albert ROBINSON créait l’institut afin de lutter contre la filariose. Cette maladie infectieuse des pays tropicaux causée par des vers parasites, les filaires, sévissait de manière endémique en Polynésie. Grâce à ce philanthrope américain, ce problème de santé publique a quasiment disparu. Et c’est pour commémorer sa mémoire qu’une stèle à son effigie a été érigée à Paea à l’occasion des 70 ans d’existence de l’institut en 2019.
En 1967, l’institut s’oriente vers une activité de recherche en océanographie médicale sur la ciguatéra, un autre problème de santé publique qui affecte 500 polynésiens/100 000 par an. Ces travaux ont ainsi permis d’isoler la toxine secrétée par une micro-algue le dinoflagellé Gambierdiscus, à l’origine de l’intoxication alimentaire causée par la consommation de poissons de récif.
À ce propos, le centre CIGUAPROD livré et inauguré le 26 septembre 2019, pour un coût de 235 millions F CF, est destiné à valoriser « les recherches sur la ciguatera par la commercialisation des ciguatoxines extraites des microalgues toxiques polynésiennes ». Mais ce centre bien que neuf a connu plusieurs pannes et plusieurs problèmes techniques. Par conséquent, la production de ciguatoxine n’avait toujours pas démarré un an après. Le ministre de la santé peut-il nous dire à l’heure actuelle si le centre COGUAPRO est enfin fonctionnelle et produit actuellement de la ciguatoxine ?
Le champ de recherche de l’Institut s’est ensuite ouvert aux arboviroses telles que la dengue, le zika et le chikungunya. La rénovation et l’extension du laboratoire d’entomologie médicale de Paea, le bâtiment INNOVENTOMO, s’inscrivent dans cette perspective de « donner au Pays les capacités de mettre en oeuvre de véritables stratégies de lutte antivectorielle et de réduction des épidémies transmises par les moustiques ». Quant au programme RESVEC, il vise à instaurer un réseau de surveillance des moustiques.
Malardé effectue également de la recherche épidémiologique. Les programmes STEPWISE et MATA’EA ont été lancés en 2019. Le STEPWISE est consacré aux facteurs de risques des maladies d’un échantillon de population de 4000 participants. Le MATA’EA cartographie l’état de santé des polynésiens à partir d’un échantillon de 2000 personnes, sur l’ensemble des archipels et inclut le recueil de prélèvements biologiques.
Le champ d’intervention de l’Institut s’étend de surcroît aux analyses biomédicales d’examens provenant des structures hospitalières et sanitaires de la Direction de la santé. De plus, il effectue de la veille sanitaire et vend des sérums et des vaccins. De surcroit en 2019, Malardé participe au moyen de la cytologie monocouche à la mutualisation des activités d’anatomo-cytopathologie au niveau territorial afin de permettre une meilleure prise en charge des cancers en Polynésie.
Force est de constater que l’extension et la dispersion graduelles de ses activités ont certes généré des ressources commerciales et justifié son évolution vers un statut d’EPIC en l’an 2000, mais elles sont également à l’origine de la « baisse tendancielle de son chiffre d’affaires » et d’une dégradation de ses comptes.
Les années 2018 et 2019 n’échappent pas à ces constats. En 2018, les restes à recouvrer s’élevaient à 300 millions de francs de factures datant pour certaines de 10 ans voire 20 ans. En 2019, le compte financier de l’établissement fait ressortir un résultat déficitaire de 123 millions francs CFP dont 116 millions en fonctionnement. Pour assainir ses comptes, l’établissement a pallié au résultat déficitaire de fonctionnement en puisant dans ses réserves. Malgré cela, l’année 2019 est qualifiée par le directeur de Malardé d’« année de profit » en dépit des 93 millions d’admission en non-valeur et des 39 millions d’annulation de titres.
L’apurement en bonne voie des comptes de l’institut Malardé est sans doute à rapporter au contrôle de ses comptes et de sa gestion par la chambre territoriale des comptes pour la période de 2010 à 2019. La chambre conclut à « un manque de stratégie et une dispersion des moyens » et recommande « le recentrage des missions et le renforcement des synergies institutionnelles » avec les antennes d’autres centres de recherches1.
Par ailleurs, la chambre estime que le modèle économique de cet « EPIC sous perfusion du Pays doit évoluer ». L’activité d’analyse biomédicale de l’Institut est fortement concurrencée par les laboratoires public du CHPF et privés des cliniques et s’est mécaniquement traduite « par une baisse tendancielle du chiffre d’affaires de l’ILM rendant complexe la réalisation de missions dispersées, allant des analyses biomédicales à la recherche appliquée ». Ce constat fait l’objet de sa Recommandation n° 6 de « Clarifier la stratégie, les missions, le statut et le financement d’un institut de recherche appliqué en Polynésie française».
La chambre estime également que la fiabilité des comptes doit être améliorée. Ainsi, « en 2019, l’ILM ne respecte toujours pas les dispositions réglementaires qui résultent de son statut d’EPIC. C’est notamment le cas du compte financier et de l’état prévisionnel des recettes et des dépenses. C’est également le cas de son inventaire qui devrait être réalisé régulièrement ». Elle appelle l’établissement à « se doter des outils permettant de fiabiliser sa gestion financière », à « formaliser son plan pluriannuel d’investissement » et à respecter le Code des marchés publics compte tenu de son statut d’établissement public.
En réponse, le directeur s’est engagé à suivre l’ensemble des recommandations.
Quant à l’année 2020, elle est exceptionnelle en raison de la crise sanitaire qui a mis de côté tous les programmes de recherches pour prioriser l’activité de laboratoires. Malardé a été amené à techniquer les prélèvements COVID. Avant le15 juillet, il a réalisé 5000 tests. Depuis le 15 juillet et jusqu’à fin décembre, 25 000 tests sont prévus. En raison de cette pandémie, l’institut n’a pas subi de coupe budgétaire et a même bénéficié d’une subvention de 100 millions de francs. L’année est par conséquent financièrement favorable avec la facturation des tests, notamment le Cov-Check PORINETIA à l’entrée des visiteurs.
Il convient de souligner les capacités de réactivité, d’adaptation et de résilience de l’établissement à cette crise sanitaire inédite ainsi qu’aux exigences de réalisation des tests covid.
Le groupe Tavini Huiraatira adresse ses félicitations aux équipes formidables de l’institut. Pour 2021, l’institut entend « plaider la reconduite de sa subvention ». Il peut être assuré du soutien du Tavini.
Je vous remercie de votre attention.
Mauruuru i te faarooraa mai !
Mme Éliane TEVAHITUA