INTERVENTION
- Question orale du Groupe Tavini Huiraatira
- à Mme la Ministre de la famille et de solidarités
- 8e Séance plénière de la session budgétaire du 13 décembre 2018
- Objet : Plan d’orientation stratégique pour la mise en oeuvre de la politique de la famille
Madame la ministre, bonjour.
Dans sa séance du 27 octobre 2016, notre assemblée adoptait une délibération portant approbation du plan d’orientation stratégique pour la mise en œuvre de la politique de la famille dont vous aviez été rapporteure avec Madame Armelle Merceron et moi-même.
Ce document de synthèse déclinait, suivant sept objectifs stratégiques, les 130 actions à mettre en œuvre pour remettre la famille au cœur de notre projet de société ; familles qui faut-il le rappeler sont chahutées, pour ne pas dire délitées par la modernité, la crise économique, sociale et la déliquescence morale que traverse notre société.
Les derniers chiffres publiés par l’Institut de la statistique sont à ce propos édifiants.
Ainsi, les résultats du recensement de la population sont sans appel.
Plus de la moitié de la population est contrainte de cohabiter dans une famille nombreuse ou dans un ménage comprenant lui-même plusieurs noyaux familiaux en raison des effets délétères de la crise économique et de l’impossibilité dans laquelle se trouve de nombreuPolynésiens à accéder à un logement à des prix décents.
La famille est devenue le dernier refuge des solidarités, mais ce rempart contre la précarité grandissante tiendra encore combien de temps ?
Cette forteresse est en train de vaciller, le rempart des solidarités familiales est en train de se lézarder.
Il suffit pour s’en convaincre, Madame la ministre, de vous rendre aux abords de la piscine municipale.
Vous y serez le témoin oculaire de la misère crasse, des bidonvilles, de la survie quotidienne.
Avez-vous pris le temps d’aller à leur rencontre car au-delà des statistiques annoncées par l’ISPF, il y a des trajectoires individuelles, des parcours singuliers ?
Le plan d’orientation stratégique avait vocation à servir de feuille de route à la mise en œuvre d’une véritable politique publique de la famille.
D’ailleurs Madame la ministre, l’article 3 de la délibération du 27 octobre 2016 exigeait du Président de la Polynésie la transmission d’un point d’étape sur la mise en œuvre dudit plan stratégique tous les deux ans.
Deux ans se sont écoulés depuis le 27 octobre 2016, nous sommes le 13 décembre 2018 et nul rapport d’étape n’a été transmis à notre honorable assemblée.
Le même plan d’actions préconisait également l’organisation d’une conférence de la famille tous les deux ans et la présentation de ces travaux par délibération à l’assemblée de Polynésie.
Deux années se sont écoulées depuis le 4 novembre 2016, date de publication au Journal officiel sans qu’aucune conférence de la famille n’ait été organisée ni aucune délibération n’ait fait l’objet d’une transmission officielle à notre assemblée.
Le plan d’orientation stratégique proposait de réorganiser les horaires d’ouverture des services du pays en allongeant l’amplitude horaire de 7 h 30 à 17 heures au lieu des horaires habituelles de 7 h 30 à 15 h 30 pour favoriser le bien-être des familles.
Madame la ministre, savez-vous que la Direction des solidarités, de la famille et de l’égalité qui remplace la Direction des affaires sociales, placée sous votre autorité continue d’afficher les mêmes horaires de 7 h 30 à 15 h 30.
Quand comptez-vous appliquer ces préconisations aux services placés sous votre tutelle ?
Madame la ministre, y a-t-il un pilote au ministère des solidarités et de la famille ?
Quand comptez-vous enfin présenter à notre honorable assemblée une véritable programmation pluriannuelle prévue à l’article 2 de la délibération précitée, se traduisant par un plan d’actions détaillant les moyens humains et financiers à la hauteur de la détresse des familles polynésiennes ?
Je vous remercie, Madame la ministre, des réponses que vous daignerez m’apporter.
Merci
Mme Éliane TEVAHITUA, Madame la représentante,
Permettez-moi de répondre à la question orale que vous m’avez adressée le 11 décembre dernier au sujet du bilan d’étape sur la politique de la famille, à laquelle vous et moi avons contribué.
En effet, c’est ensemble que nous avons constaté le délitement des liens familiaux en Polynésie française, que mon métier d’enseignante et mon engagement associatif de longue date m’avaient déjà permis de cerner.
Et c’est donc ensemble que nous avons travaillé pendant plusieurs mois à la détermination d’une véritable politique publique de la famille.
Ma conviction de l’absolue nécessité d’accompagner la famille est toujours la même à ce jour et elle ne risque pas de faillir, tant je connais ses souffrances.
Après la feuille de route de mon ministère présentée au mois de juillet 2018 lors du premier séminaire gouvernemental, et après cinq mois de nombreuses rencontres de proximité, nous en sommes à la mise à jour de notre projet ministériel d’intervention et bien évidemment les préconisations du COPIL famille y ont été intégrées.
Je me permets de vous rappeler, madame la représentante, que certes, si un ministère se doit de travailler sur sa feuille de route et de lancer de grands chantiers, un nouveau ministre de la famille et des solidarités se doit quant à lui de s’atteler à poser, dans un premier temps, les fondations d’un travail de proximité.
Sachez que c’est une démarche qui me tient réellement à cœur.
Un nombre non négligeable de familles, de couples, d’handicapés, d’anciens et d’actuels détenus, d’associations, ont été reçus, visités, entendus, accompagnés durant ces derniers mois dans notre ministère. 60 % des demandes concernaient le logement et 40 % les aides sociales. Nous avons rencontré une dizaine d’établissements, une quinzaine d’associations, ainsi que nos agents de terrain dans toutes les circonscriptions sociales de Tahiti Dans le secteur du social et de la solidarité, ce n’est pas en restant dans nos bureaux climatisés que l’on devient efficient.
C’est au contraire le temps de la proximité, passé à écouter et analyser, qui est, de mon point de vue, strictement nécessaire pour affiner et mener une véritable politique sociale.
C’est dans cet objectif que j’a i multiplié, depuis mon arrivée, les rencontres avec tous. Agir plus largement, avec concertation et précision, pour une réussite pérenne, tel était le but fixé de ces nombreuses rencontres.
De plus, suite au point d’étape transmis au Président de la Polynésie française par la présidente du COPIL famille le 22 octobre 2018, mon cabinet s’est attelé en premier lieu à préparer le bilan des actions qui avaient été préconisées et qui vous sera présenté prochainement par le Président de la Polynésie française.
En second lieu nous avons préparé les propositions qui seront soumises à la prochaine conférence de la famille que j’ai moi-même décidé de repousser au premier semestre 2019 afin qu’elle soit en phase avec notre nouvelle feuille de route.
Concernant la Direction des solidarités, de la famille et de l’égalité, une véritable réorganisation de ce service administratif, qui va bien au-delà d’une simple modification des heures d’ouverture, a été entamée depuis mai 2017 déjà, date à laquelle une évaluation des besoins en emplois, effectifs et compétences de la DSFE a été réalisée par la DMRA.
Ont donc été organisées entre autres :
– Le transfert de la gestion du Fare Matahiapo de Taravao vers la direction de la santé ;
– Le transfert de l’admission au RSPF vers la CPS ;
– La simplification des procédures d’attribution des aides de première nécessité (alimentaire, vestimentaire et produits d’hygiène et d’entretien) ;
– La mise en place d’une carte prépayée destinée à remplacer les bons alimentaires, vestimentaires et en produits d’hygiène et d’entretien ;
– La construction d’un système d’information performant par la création du progiciel de gestion de dossier social unique ;
– Et le transfert de la gestion des aides sociales des RGS vers la DSFE.
Pour 2019, la réorganisation des heures d’ouverture de la DSFE est inscrite dans nos projets.
En attendant, un numéro d’astreinte disponible 24 h/24 h existe à la DSFE depuis 2016 et les responsables de circonscription de la DSFE demeurent disponibles en tout temps.
Par ailleurs, parce que nous sommes hautement conscients de la nécessité de ramener les agents de la DSFE vers leur cœur de métier, le président et le vice président, ministre des finances, ont clairement marqué leur soutien envers ce service, en actant la création de 12 postes pour l’année 2019 sur les 24 demandes que j’ai défendues en arbitrage budgétaire.
Il s’agit là d’un préalable indispensable pour que notre service, qui comme vous le rappelez si bien, est sous ma tutelle, soit des plus performants.
Pour terminer mon propos, j’affirme que les cinq derniers mois que nous avons pris pour cette préparation, s’ils ont pu vous paraître improductifs, étaient nécessaires, je dirais même incontournables.
La démarche de travail que j’ai décidé d’appliquer au sein de mon ministère et qui semble vous faire tant douter de la présence d’un pilote au ministère des solidarités et de la famille, d’où « il ne sortirait rien », ai-je même entendu dire il y a quelques mois, est celle du projet que vous connaissez tous : objectifs stratégiques puis opérationnels, engagement de l’équipe de projet, pilotages techniques, stratégiques et budgétaires pour chacune des actions de la feuille de route.
C’est pour mon équipe et moi, la garantie que chacun de nos projets sera mené à bien et sans embûche.
Je vous remercie, Madame la représentante.
Mme Isabelle Sachet