INTERVENTION
Intervenante du groupe Tavini Huiraatira : Mme Éliane TEVAHITUA
Rapport n° 114-2022 du 4 novembre 2022
Lettre n° 6671/PR du 6 septembre 2022
Temps de parole : 11 mn
Consigne de vote : Favorable
DOCUMENTS
SÉANCE DE LA COMMISSION PERMANENTE DU 21 DECEMBRE 2022
Rapport relatif à un projet de délibération portant approbation des comptes administratifs de l’exercice 2021 du budget principal du Centre hospitalier de la Polynésie française et des budgets annexes du Département de psychiatrie, du Centre de transfusion sanguine, du Service d’aide médicale urgente (SAMU/CESU), de l’Hôtel des familles, de l’École de sages-femmes et de l’Unité de consultations et soins ambulatoires (UCSA) et affectation de leur résultat
Seul le prononcé fait foi
Monsieur le Président de l’Assemblée, Monsieur le Président,
Comme pour les autres établissements publics, la pandémie de la Covid en 2020 et 2021 n’a pas été sans conséquence sur le fonctionnement et les comptes administratifs du CHPF.
À situation sanitaire exceptionnelle l’hôpital a bénéficié de dotations exceptionnelles de la part du Pays. En 2022, la situation à l’hôpital est revenue à un régime normal, malgré une petite vague Omicron en début d’année.
La gestion de cette pandémie de deux années aura été selon la direction du CHPF « une année extrêmement traumatisante pour tous les professionnels de santé », notamment la dernière année 2021 avec des défections de carrières, beaucoup d’absentéisme, de problématiques psychosociaux, des demandes de mise en disponibilité ou de temps partiel.
Et ce, malgré « une très forte mobilisation de la médecine du travail pour accompagner les professionnels de santé en situation difficile », la mise en place de dispositifs de soutien psychologique et la création d’une « salle de bienêtre pour permettre aux professionnels de santé de pouvoir se sentir, dans des moments de leur journée, pris en charge et surtout écoutés ».
Il est normal de se préoccuper de l’état psychologique des professionnels de santé. Mais l’hôpital a été avant tout conçu pour la bonne prise en charge médicale et psychologique des patients. Quid de l’état psychologique des patients hospitalisés lors de cette crissanitaire sans précédent ainsi que de leurs familles ?
Avez-vous procédé à une évaluation du ressenti des patients et de leurs familles lors de la crise sanitaire ? Ce sont pourtant ces patients et leurs familles qui sont le plus à plaindre que des soignants en bonne santé car les malades ont été coupés de tout lien avec leurs familles et ces dernières n’ont pu visiter leurs proches ni faire le deuil de leurs disparus.
Certes la direction juridique et des droits des patients a mis en place un dispositif d’accompagnement et d’information des familles car les mesures de sécurité sanitaire empêchaient les visites.
Mais, des familles se sont plaintes auprès des élus de ne pas avoir été suffisamment soutenues, ni accompagnées psychologiquement dans leurs deuils. Elles se sont senties parfois abandonnées à leur triste tort. En 2022, force est de constater que l’hôpital est déjà saturé au bout d’une dizaine d’années d’existence.
Il est saturé même hors périodes de saisonnalité, en raison des prises en charges lourdes de patients présentant plusieurs pathologies. Dans un contexte où la ressource publique se fait rare, cet état de saturation appelle à trouver des alternatives à l’hospitalisation complète.
Si l’hospitalisation de jour est une alternative appréciable, est-il judicieux d’étendre les capacités du service d’oncologie alors que l’Institut du cancer serait à même de participer aux soins ? Nous avons le sentiment de luttes intestines entre les deux établissements publics qui n’ont pas lieu d’être. Par ailleurs, la transformation managériale de notre hôpital ne devrait -elle pas passer par la transformation de postes administratifs pléthoriques de cadres de santé en postes de soignants ?
Cette transformation aurait pourtant le mérite d’alléger les personnels de garde en état chronique de burn-out. Outre les retours d’expériences mettant en évidence que près de 83 % des professionnels de santé du CHPF estiment la crise covidienne bien ou très bien gérée, la question princeps demeure la capacité de notre hôpital à faire face à une future pandémie.
Ainsi, il est prévu d’étendre la capacité d’accueil du CHPF avec « des services et des lits déjà armés pour servir de façon réversible d’unité de réanimation éphémère », de constituer une réserve sanitaire territoriale, de prévoir avec le SAMU une filière de prise en charge du risque épidémique et bactériologique (REB), d’organiserl’hôpital en un grand secteur Covid et en cas particuliers.
Il importe également que notre hôpital soit doté de respirateurs artificiels qui a parfois fait défaut pendant la crise sanitaire. Les dépenses liées aux molécules onéreuses ont augmenté de manière exponentielle.
De 750 millions il y a quelques années, elles représentent aujourd’hui la somme de 2,5 milliards F CFP. Elles croissent en même temps que croissent les nouveaux cas de cancers par an. De 200 il y a quelques années, nous sommes rendus à 800 nouveaux cancers en moyenne par an.
« Entre 6000 et 7 000 personnes sont dans la file active, et (cette) file active ne fait qu’augmenter ». Toutes ces dépenses sont prises en charge non pas par le principal auteur du dommage radioactif mais par l’ensemble des Polynésiens au travers de la CPS.
Est-ce bien normal, M. le ministre ? Est-ce bien normal que l’État responsable des essais radioactifs ne prenne pas entièrement en charge les maladies cancéreuses radio-induites dont l’ardoise est évaluée à 100 milliards CFP et augmente chaque année de 5 milliards de francs ?
Pour conclure, nonobstant mes remarques sur la prise en charge psychologique des patients et de leurs proches, le groupe Tavini Huira’atira votera favorablement ce compte administratif.
Mme Eliane TEVAHITUA
Représentante inscrite au groupe Tavini Huiraàtira